Contentieux de l’aptitude et de l’inaptitude au travail : une étude inédite

 AvoSial et LexisNexis font une radiographie du contentieux des avis du médecin du travail. L’étude, inédite, s’appuie sur plus de 200 arrêts de Cours d’appel. C’est mitigé

 Chaque année, en France, plus d’un million de salariés seraient concernés par des avis de restrictions d’aptitude ou des demandes d’aménagement de poste, et environ 100.000 par des avis d’inaptitude notifiés par un médecin du travail. Jusqu’au 1er janvier 2017, salariés et employeurs pouvaient contester ces avis devant l’inspection du travail, procédure souvent synonyme de  parcours du combattant. La loi El Khomri du 8 août 2016 dite « loi Travail » a transféré ce contentieux aux conseils de prud’hommes en procédure accélérée dans l’objectif de simplifier la procédure de contestation des avis d’(in)aptitude. Avec quelques années de recul, l’effet escompté est-il obtenu ? Rien n’est moins sûr.

 

La contestation d’un n avis d’inaptitude concerne  70 % des affaires. Près de 46 % des demandeurs sont des employeurs, contre  54 % de demandeurs salariés.  « Les situations sont cependant diamétralement opposées : un salarié veut éviter de perdre son emploi ou, à défaut, percevoir des dommages et intérêts, alors que l’employeur cherche en général à maintenir le salarié apte pour éviter le coût d’une rupture de contrat pour ce motif », observe le document dont la synthèse est rendue  rendu publique ce 10 février.

 

Appel compris, l’enquête menée par AvoSial en partenariat avec LexisNexis révèle que la durée moyenne des procédures s’établit à un peu plus d’un an. Conformément à la perception des avocats praticiens du droit du travail au quotidien, cette procédure est trop longue au vu des attentes que salariés et employeurs peuvent légitimement avoir sur un sujet à forts enjeux humains voire financiers, dans une procédure supposément accélérée.

 

Avec une moyenne de neuf moiis entre l’appel et l’arrêt de la Cour de cassation, c’est la procédure d’appel qui contribue le plus à augmenter cette durée. A l’inverse, dans la procédure initiale devant les prud’hommes, on compte 3,7 mois en moyenne entre la saisine et le jugement.

 

 

 

Dans un autre registre, environ 35 % des recours menés par des employeurs obtiennent une issue favorable, contre 32 % menés par des salariés. Le taux de succès modéré des requérants peut être vu comme un gage de sécurité juridique : l’avis du médecin du travail n’étant remis en cause que dans un tiers des cas, les décisions prises à la suite de cet avis (maintien dans le poste ou licenciement selon le cas) sont donc peu perturbées. Du point de vue des requérants, ce faible taux de succès suscite toutefois une frustration renforcée par la durée de la procédure.

 

« Les enseignements de cette étude sont précieux pour nous permettre de dresser un constat motivé, réaliste et le plus objectif possible, sans nous fier uniquement à notre intuition », indique Xavier de Jerphanion ( Chassany Watrelot & Associés), vice-Président d’AvoSial. « A l’approche des prochaines échéances électorales, nous allons présenter aux candidats des propositions de réforme juridique visant notamment à améliorer cette procédure de contestation des avis d’(in)aptitude et permettre une plus grande fluidité dans le traitement de ce contentieux, dont la durée pénalise aussi bien les entreprises que les salariés parties au procès. »