L’art de manager dans une société exigeante et un contexte mouvant.

Ancien président fondateur du cabinet de conseil en management Inergie, Philippe Détrie vient de publier aux Editions Eyrolles, « Manager au XXIe siècle ».

 

 

 

Un défi d’ouverture, d’agilité, d’attention, de coopération, prévient l’auteur, expliquant que notre société est « de plus en plus ouverte, foisonnante, hybride, démocratique, en quête de bien-être. ». Le manager intervient dans des organisations qui seront plus agiles, plus collaboratives, plus responsables, plus communicantes. il devra se montrer « plus relationnel, plus entraînant, plus inspirant », tout en donnant confiance et envie.

Ce livre didactique, loin de la langue de bois, propose trente bonnes pratiques managériales opérationnelles : dix savoir-être, dix savoir-faire et dix savoir-accompagner.

Philippe Détrie n’en est pas à son coup d’essai. Il avait signé en 2009, aux Éditions d’organisation, « La convivialité. Aller vers une entreprise où il fait bon travailler ». Auparavant, il avait publié chez Dunod « L’entreprise durable. Utilité à la société – Satisfaction des clients – Performance pour les propriétaires – Accomplissement des salariés » (2005) . Vice-président de la Ligue des Optimistes de France, il a coécrit de nombreuses pièces de théâtre d’entreprise et deux comédies musicales avec Hervé Sérieyx. Il est le fondateur de la Maison du Management. Voici un extrait de son dernier livre, qui donne le ton.

 

 

 

« Trois bonnes pratiques managériales

 

1-Donner envie plutôt que décréter

 

Un manager ne devrait plus rien décréter ! Plus personne n’accepte l’embrigadement ni le formatage qui conduisent à la routine, à la décérébration et sûrement au désengagement. La souplesse l’emporte aujourd’hui sur la contrainte. On sait qu’on ne motive pas une personne, c’est la personne qui se motive. C’est le manager qui crée les conditions de la motivation. Et qui supprime les obstacles éventuels, les fameux facteurs d’hygiène selon Herzberg55 : leur suppression ne crée pas de la motivation mais seulement la disparition de la démotivation. Changer ma chaise défoncée m’évitera d’avoir mal, mais ne créera pas d’enthousiasme pour autant. Pour donner envie, l’association aux décisions est essentielle. En exigeant au lieu de demander, le manager prive ses collaborateurs du sentiment d’être libres de faire ou ne pas faire, au risque de nier leur existence. On passe du « command and control » au « trust and inspire ». Et au bout du compte, responsabiliser des collaborateurs est un pur bonheur. C’est une mission exaltante du manager. Le banquier aussi brillant qu’atypique Matthieu Pigasse  l’écrit : « Il n’y a pas de plus bel engagement que de permettre à chacun de pouvoir agir sur sa vie. »

 

 

2-Libérer l’initiative

Nous l’écrivions dans l’introduction : réussir pour un manager, c’est faire réussir ses collaborateurs. Tous les parents essaient de guider leurs enfants vers ce pour quoi ils sont faits. Même démarche pour le travail, en plus à une époque où chacun est incité à devenir son propre entrepreneur et l’artisan de sa vie professionnelle. Un collaborateur qui s’épanouit dans son travail est plus efficace, plus motivé, plus collectif.

Le rôle du manager est de donner de l’autonomie pour créer de l’engagement. « Ma mission consiste à faire naître chez mes collaborateurs l’envie de rester », dit Thierry Marx, chef du Mandarin Oriental. Belle illustration de plus de liberté et moins de contrôle dans les pratiques managériales.

Comment ? En recherchant avec chacun de ses collaborateurs son potentiel d’initiative, en co-créant une mission où le collaborateur aura carte blanche, en créant les conditions favorables à sa prise d’initiatives (accompagnement, moyens, droit à l’erreur…). Et surtout en le laissant agir comme il le souhaite, sous réserve bien sûr d’absence de nuisance pour le collectif. Le président américain Theodore Roosevelt disait : « Le meilleur manager est celui qui sait trouver les talents pour faire les choses, et qui sait aussi réfréner son envie de s’en mêler pendant qu’ils les font. » Vive la délégation !

 

 

3-Prendre en compte les ABC (attentes, besoins, contraintes) de chacun de ses collaborateurs

 

Le travail du manager consiste à discerner ce qui motive (et ce qui freine) chacun de ses collaborateurs : est-ce le défi, le devoir, la reconnaissance, le pouvoir, le plaisir, le progrès professionnel ? Chacun est mû par un mélange souvent confus de motivations qu’il n’est pas facile d’identifier, d’autant que chacun voit au travers de son propre prisme. Pour s’intéresser à l’autre, il est essentiel d’écouter, d’observer, d’organiser des contacts et des rencontres régulières. Chacun est persuadé qu’il possède ces qualités. J’ai demandé à mes enfants à chaque dîner auquel ils étaient invités de poser au moins trois questions à leurs voisins de droite et de gauche. Des questions spécifiques sur la vie de leurs voisins de table, leurs goûts, leurs passions (pas du style : pourriez-vous me passer le beurre ?). Simplement pour éviter qu’à la sortie du dîner, quelqu’un puisse se dire : « Finalement, si je n’étais pas venu(e), personne ne s’en serait aperçu. » Connaître, ce n’est pas uniquement côtoyer. C’est être capable d’appréhender les croyances, valeurs, aspirations, idéaux… de chacun pour pouvoir les mobiliser et les mettre en mouvement. Posez chaque jour trois questions à chacun de vos collaborateurs, la proximité humaine y gagnera fortement. »