Grâce à l’explosion des ruptures conventionnelles dont le flux mensuel a atteint le niveau record de 36 204 en juillet dernier pour seulement 5% de refus, les conflits prud’homaux sont en baisse. C’est ce que signalent les services de la garde des Sceaux, Christiane Taubira.
La dernière édition des «Chiffres clés de la justice » (2013) recense, dans les 210 conseils de l’Hexagone, quelque 188000 affaires terminées dont 29500 référés. Le nombre de différends portés en justice accuse ainsi une chute de 8,5% par rapport à la période précédente. Une tendance dont l’ex-ministre du Travail, Michel Sapin, s’était félicité, pronostiquant le désengorgement des tribunaux du travail. En réalité, la diminution du nombre d’affaires se traduit par des traitements à peine plus rapides. La durée moyenne de règlement des dossiers est passée de 11,9 à 11,3 mois. Même les référés, de plus en plus nombreux, s’avèrent complexes et lents, ne se dénouant qu’au bout de deux mois environ, là où quelques semaines suffisaient. Et encore, les durées sur le fond varient de 15 à 16 mois au niveau national.
Par ailleurs, il n’est pas rare que des affaires traînent jusqu’à deux ans et demi, voire trois.À tel point que certains tribunaux signent des conventions avec les avocats afin que les parties en présence œuvrent à l’accélération des procédures. C’est le cas à Caen où, en 2012, le président du conseil de prud’hommes, Jean-Marie Autin, et son vice-président, Robert Rousso, ont passé une convention avec l’ordre des avocats au barreau de la ville représenté par la bâtonnière Ariane Weben. Il a été convenu de « réduire le délai entre la première audience devant le bureau de jugement et celle où l’affaire est plaidée ». Cela limite le nombre de renvois potentiels. Les signataires du texte décident aussi de « tenir compte des contingences liées à la communication des pièces entre les parties ainsi qu’à l’instruction du dossier, variable selon son niveau de difficulté, dans le respect du contradictoire ; d’encourager, à tous les stades de la procédure, la recherche de la conciliation». Et sauf circonstances exceptionnelles, aucun renvoi n’est accordé. Le deal, efficace, donne des idées à d’autres juridictions du travail qui pourraient s’en inspirer.
Toutefois, cela n’enlève rien à la ténacité de certains plaignants qui préfèrent jouer les prolongations. Le taux d’appel sur les jugements au fond dépasse 62% pour les conseils de prud’hommes en première instance. Car le désengorgement relatif a un effet secondaire : les juges semblent enclins à standardiser les indemnisations, tout en tenant compte de la gravité des torts et de l’ancienneté du salarié dans son poste. Ce qui frustre les protagonistes dans bien des cas, les incitant à poursuivre les procédures.