Déjà occupé à trouver une sortie de crise avec les syndicats, le gouvernement doit faire face à un second front, ouvert par les organisations patronales. Se disant jusque-là satisfaites du “bon équilibre” du projet de réforme, elles commencent à prendre leurs distances. La piste de l’augmentation des cotisations avancée par le secrétaire général de la CFDT, Laurent Berger, et étudiée par le Premier ministre, Édouard Philippe, est catégoriquement rejetée par les professions libérales.
Président de l’Unapl et vice-président de l’U2P, Michel Picon, reçu à deux reprises à Matignon les 18 et 19 décembre, tient sur ce point, un discours de fermeté : “les professionnels, libéraux refusent toute augmentation de cotisation et toute baisse de pension. Ils n’accepteront pas d’être les perdants d’une réforme qui se ferait à leur détriment”. Le changement de ton est net : une semaine plus tôt, Alain Griset, président de l’U2P était plus conciliant.
La CPME aussi s’oppose à tout renchérissement des prélèvements. “Il en est de la responsabilité du gouvernement de ne pas céder à la menace et de refuser une telle solution de facilité”, gronde l’organisation présidée par François Anselin, tout en qualifiant l’initiative cédétiste de “marchandage revenant à ponctionner le pouvoir d’achat des salariés et à diminuer la compétitivité des entreprises en augmentant le coût du travail”.
Au Medef, le président, Geoffroy Roux de Bézieux, estime qu’il y a “trois solutions pour résoudre le problème du déficit : augmenter les cotisations pour les salariés et les employeurs, ce n’est pas possible. Baisser les retraites, c’est inacceptable. La troisième, qui est la bonne, c’est de faire travailler plus longtemps”.
Mais cette analyse que partage François Anselin, est unanimement rejetée par les syndicats. La CFDT ne veut pas entendre parler de l’âge pivot. Le report de l’âge de départ n’est pas négociable, martèle Dominique Corona, secrétaire national de l’Unsa en charge du dossier. Au nom de la CFTC, la vice-présidente, Pascale Coton, est formelle : “l’âge légal de départ à la retraite doit être maintenu à 62 ans”.
L’autre motif de mécontentement des organisations patronales réside dans la persistance de la grève. Plusieurs fédérations impactées tirent la sonnette l’alarme. À l’image de l’Association française du rail (AFRA). “Au moment de l’ouverture du marché ferroviaire à la concurrence, cette situation démontre que les opérateurs alternatifs ne pourront pas assurer efficacement leur rôle”.
Les armateurs, les agents maritimes et consignataires, l’Union des ports et celle des industries de manutention, ainsi que les entreprises de transport terrestre et de logistique, s’impatientent. La dernière filière réclame au gouvernement “des mesures actives de soutien aux entreprises touchées”.