
Les premiers comités sociaux et économiques (CSE) mis en place en 2019 par fusion des ex-instances DP, CHSCT et CE dans les sociétés de plus de 300 salariés, arrivent au bout de leur mandature qui est en principe de quatre ans. À l’heure où les syndicats s’apprêtent à solliciter de nouveau les votes des salariés, le cabinet Voltaire Avocats fait une radiographie de la transformation imposée par les ordonnances Travail. Son analyse est mitigée.
Le cabinet note dans les grandes sociétés le relatif éloignement des représentants du personnel et la centralisation excessive du dialogue social. Résultat : des réunions aux ordres du jour surchargés dans de nombreuses entreprises. Pourtant, le législateur a prévu la possibilité de mettre en place des représentants de proximité pour compenser toute centralisation excessive. De fait, observe David Guillouet, avocat associé, expert en négociation collective, « le dispositif étant facultatif, de nombreuses entreprises ne sont pas dotées de représentants de proximité ». Selon le rapport d’évaluation des ordonnances du 15 décembre 2021, seuls 25% des accords mettant en place le CSE prévoyaient la mise en place de représentants de proximité. Et même lorsque des représentants de proximité ont été mis en place, « leur rôle est mal défini et des difficultés d’articulation avec le CSE ont été constatées », insiste David Guillouet.
Une autre difficulté tient au rôle des commissions santé sécurité et conditions de travail (CSSCT), instituées en lieu et place des CHSCT. Voltaire Avocats est catégorique : « En pratique, le constat est que le rôle de la CSSCT est souvent mal compris. Il y a une certaine désorganisation du CSE pour le traitement des problématiques santé, sécurité au travail, dans la mesure où le rapport entre CSSCT et CSE n’est pas toujours évident à déterminer. C’est parfois plus simple dans une entreprise de moins de 300 salariés -où elle n’est pas obligatoire-, dans la mesure où c’est une seule instance qui gère ces questions.
La principale raison ? En premier lieu, le fait que la CSSCT ne dispose d’aucune attribution consultative a pu être source de crispations dans la mesure où c’est la CSSCT qui « fait le travail » alors qu’au final, c’est le CSE qui est consulté.
Dans un autre registre, la loi a laissé aux partenaires sociaux une marge de créativité pour adapter les textes à leur propre contexte. Peu d’entre se sont emparés de cette opportunité, observe Louise Peugny, avocate, également associée. Motif : frilosité des partenaires sociaux, accords négociés à l’économie focalisés sur les moyens attribués au CSE (heures de délégation supplémentaires, nombre d’élus) ; parfois au détriment de questions essentielles, telles que le périmètre de mise en place du CSE.
Dans ces conditions, le renouvellement s’annonce périlleux. Certains DRH anticipent une difficulté plus grande des organisations syndicales pour trouver des candidats, dit Voltaire Avocats. Sans parler de l’écueil que représente l’obligation de parité. Malgré cela, peu d’entreprises envisagent de renégocier leur accord relatif au dialogue social. Bien que de nouvelles thématiques émergent ou se renforcent, alourdissant les responsabilités des représentants du personnel : environnement, partage de la valeur ajoutée, contribution à la gouvernance, etc.