Les Français adoptent de nouvelles habitudes avec la popularité des paiements numériques

Au cours des cinq dernières années, la manière dont l’argent circule a profondément changé. Tandis que les cafés du Quartier Latin arborent encore des pancartes Espèces bienvenues, le pays vit désormais surtout de chiffres.

En 2024, pour la première fois, le nombre de paiements par carte a dépassé celui des transactions en espèces aux points de vente, atteignant 48 %, contre 43 % en espèces. Ce basculement, détecté par l’enquête SPACE de la Banque centrale européenne et détaillé par la Banque de France, n’a rien d’une mode passagère.

France en 2025 : Du portefeuille au smartphone

Si 2019 récompensait encore le tintement des pièces, 2025 célèbre le clic sans contact. Selon une enquête SumUp menée auprès de 1 500 consommateurs, 66 % des Français préfèrent déjà payer par carte, presque toujours en sans‑contact, tandis que 27 % privilégient les solutions numériques pour leur rapidité.

En outre, les paiements via smartphone ont grimpé de 61 % en douze mois et représentent déjà 13,5 % de toutes les opérations par carte en caisse, résultat direct du relèvement du plafond du sans‑contact et de la familiarité avec les porte‑monnaie mobiles comme Apple Pay et Paylib. Cet appétit s’étend, littéralement, à l’univers en ligne.

En 2024, un quart de tous les paiements des consommateurs français s’est effectué sur internet, soit une hausse de cinq points en seulement deux ans. Cette évolution se lit dans les statistiques de recherche de Google. Les recherches d’applications bancaires ont bondi de 60 % en douze mois, signe que l’application est devenue la nouvelle agence pour des millions de titulaires de compte. En quête de commodité totale, beaucoup se tournent vers des plateformes déjà enracinées dans le commerce électronique.

Sans surprise, PayPal reste le leader absolu : 85 % des internautes qui utilisent un service de paiement en ligne y ont recours, loin devant Apple Pay (20 %) et Paylib (14 %). L’omniprésence de PayPal éclaire aussi pourquoi des secteurs traditionnellement sensibles à la trésorerie rapide, comme le divertissement virtuel, gravitent autour du service.

Les joueurs sont de plus en plus nombreux à privilégier la praticité des casinos en ligne avec dépôt par Paypal. Un modèle qui évite de saisir ses coordonnées bancaires à chaque mise et transfère les fonds en quelques secondes. Le rôle central des porte‑monnaie électroniques ne se résume pas au géant californien. Initiative 100 % française, Paylib comptait fin mai 2025 environ 35 millions d’inscrits, soutenu par un consortium réunissant les sept plus grands groupes bancaires français.

En autorisant des virements instantanés de compte‑à‑compte via le simple numéro de téléphone, le service s’est imposé comme alternative domestique et prépare désormais son intégration au futur projet européen de paiements, l’EPI.

Portefeuilles numériques, virements instantanés et banques 100 % en ligne

La popularité du sans‑contact a transformé les portefeuilles numériques en portes tournantes où l’argent circule à la vitesse de la lumière. Entre le premier semestre 2023 et le premier semestre 2024, le volume des virements instantanés a bondi de 70 %, pour représenter près de 10 % de tous les crédits SEPA effectués dans le pays.

Porté par les grands groupes bancaires, Paylib a surfé sur cette vague en proposant un service P2P gratuit, tandis que l’EPI prépare le lancement de Wero comme riposte continentale aux géants Visa et Mastercard. Les prochains mois pourraient ainsi sceller un écosystème où les espèces deviennent l’exception.

Et le paysage bancaire français ne tient plus derrière les guichets. Une enquête SumUp auprès de 1 500 personnes révèle que 34 % des clients ont déjà migré vers des banques exclusivement numériques et que 10 % ont coupé tout lien avec les agences physiques. La courbe s’accentue chez les jeunes.

Près de 46 % des 18‑24 ans et 52 % des 25‑34 ans gèrent tout via l’application, alors que 78 % des plus de 65 ans restent fidèles au “guichet” traditionnel. La contraction du réseau se voit en ville, 3 296 agences ont fermé entre 2020 et 2025, faisant passer le parc de 39 707 à 36 411 implantations. Le phénomène, qualifié de la plus grande refonte du paysage bancaire depuis les années 1990, frappe surtout les réseaux Société Générale (‑542) et BNP Paribas (‑304). Pourtant, l’Île‑de‑France reste championne du digital, 44 % des titulaires y déclarent avoir changé de modèle bancaire l’an dernier.

Pour les indépendants et les micro‑entreprises, l’attrait dépasse les frais. Un article de Gestion Sociale souligne que la banque en ligne offre une vision de trésorerie en temps réel, des cartes virtuelles segmentées et une intégration comptable automatique, avantages impossibles à reproduire au comptoir, surtout hors des grandes agglomérations.

Conséquence, deux Français sur trois (67 %) n’ont pas mis les pieds dans une agence depuis plus de six mois, et 7 % ne l’ont jamais fait. Dans le même temps, la possibilité d’échelonner sans frais ni paperasse propulse le Buy Now, Pay Later (BNPL) auprès du grand public. Dans l’enquête SumUp, 9 % des sondés ont utilisé des services comme Klarna ou PayPal Credit au cours des douze derniers mois, principalement pour de la mode ou de l’électronique en ligne. Côté offre, Xerfi estime que le marché français du paiement fractionné a pesé entre 8 et 10 milliards d’euros en 2024.

Il pourrait dépasser 13 milliards dès 2026, malgré un tour de vis réglementaire qui rapproche le BNPL du crédit à la consommation classique. Cette croissance témoigne aussi d’un changement dans la fmanière de régler les achats du quotidien. Toujours selon l’étude SumUp, 5 % des consommateurs ont déjà adopté les paiements par abonnement, des paniers de produits bio livrés chaque semaine à la nourriture pour animaux, pour lisser leur budget mensuel.

L’inflation éclaire cette tendance, étaler les dépenses fixes en micro‑échéances devient une stratégie d’autodéfense financière, surtout chez les millennials. Toutefois, la Directive européenne sur le crédit à la consommation, qui entrera en vigueur en novembre 2026, imposera des contrôles de solvabilité plus stricts et une transparence accrue des coûts.

IA et automatisation des dépenses : Confiance en construction

Si la France paie déjà sans voir, payer sans même y penser relève d’un tout autre niveau. L’enquête de SumUp révèle que 70 % des Français ne font pas confiance à l’intelligence artificielle pour autoriser des transactions en leur nom, tandis que 30 % se disent ouverts à l’idée à divers degrés.

Parmi les favorables, 11 % limiteraient l’automatisation aux factures récurrentes (eau, électricité, streaming) et seuls 7 % accepteraient qu’un robot paie le café ou le métro sans intervention humaine. Ce scepticisme fait écho aux chiffres d’Ipsos‑CESI, 35 % redoutent des risques pour la vie privée lorsque des algorithmes accèdent aux données financières, et 41 % voient dans l’IA une menace potentielle pour l’emploi.

L’ouverture grandit toutefois à mesure que l’âge baisse. Quelque 45 % des 25‑34 ans se disent prêts à tester des paiements assistés, contre à peine 17 % des plus de 55 ans. Les acteurs du paiement flairent déjà l’occasion.

Mais l’adoption massive dépendra des régulateurs, la Banque de France et Cla NIL, qui doivent concilier innovation et protection des données dans un pays très attaché au RGPD et à la souveraineté numérique. Les Français règlent de plus en plus avec leur carte ou leur smartphone, mais gardent une certaine réserve dès qu’il s’agit de sécurité. Le rapport 2023 de l’Observatoire de la sécurité des moyens de paiement montre que le taux de fraude à la carte est tombé à 0,053 %. Le plus bas jamais enregistré, grâce à l’Authentification forte du client (SCA) et à la généralisation des “tokens” qui masquent les données réelles de chaque transaction.

Cette distance se traduit sur le terrain. Dans les départements ruraux, des commerçants constatent que le numéraire reste fort parce qu’il donne une “impression de contrôle”, tandis qu’à Paris et à Lyon le sans‑contact règne au comptoir.

La Banque de France, conscience du dilemme, a depuis 2024 renforcé le cadre réglementaire, blocage automatique des appels suspects de “faux conseiller” et plafonds plus stricts pour les virements non authentifiés. Des mesures qui commencent déjà à figurer dans les rapports de conformité des grands établissements.

Wero et euro numérique : Un pas vers la souveraineté européenne

La quête de moyens de paiement sûrs et, surtout, européens se renforce avec le lancement de Wero, le portefeuille numérique instantané de l’European Payments Initiative (EPI). Le service a fait ses débuts en France avec l’appui de sept groupes bancaires, BNP Paribas, BPCE, Crédit Agricole, Crédit Mutuel, Arkéa, La Banque Postale et Société Générale.

Il promet des transferts de compte à compte en moins de dix secondes, directement dans les applis déjà familières aux utilisateurs. L’ambition est claire, rivaliser avec Visa, Mastercard et, bien sûr, PayPal qui domine l’e‑commerce. Wero s’appuiera sur le réseau Paylib pour accélérer son adoption et devrait arriver dans les points de vente physiques en 2026. Par ailleurs, la Banque centrale européenne poursuit la phase préparatoire de l’euro numérique commencée en novembre 2023.

Le projet, qui doit se prolonger jusqu’en 2026, se concentre désormais sur la définition du cadre opérationnel et la sélection des prestataires pour une infrastructure permettant d’utiliser la monnaie en ligne et hors ligne, sans frais de base pour les particuliers.

PME et micro‑entreprises : Efficacité en temps réel, sans terminal sur le comptoir

Pour qui tient un petit commerce, la numérisation des paiements n’est plus un luxe. Des outils comme Tap to Pay de SumUp transforment n’importe quel smartphone en terminal sans contact, sans abonnement mensuel et avec seulement une commission par transaction.

Dans sa version française, le service accepte portefeuilles mobiles et cartes physiques jusqu’à 50 € en sans‑contact, sans plafond pour les paiements via Apple Pay ou Google Wallet. L’attrait saute aux yeux. Les relevés du portail Comparateur Banque signalent une baisse moyenne de 0,86 point de pourcentage des frais lorsqu’un commerçant opte pour des offres telles que Paiements Plus, lancé en mai 2025, qui combine abonnement mensuel et commission de 0,89 %.

Ajoutée à l’émission de factures numériques et à l’intégration comptable en un clic, la solution offre aux entrepreneurs une visibilité en temps réel de leur trésorerie et réduit les erreurs de rapprochement.

Pendant ce temps, des start‑up locales comme Viva.com et EasyTransac se disputent le même marché en promettant des frais d’entrée nuls. En combinant sécurité, portefeuilles souverains comme Wero et solutions plug‑and‑play pour les PME, la France prépare la dernière ligne droite vers un écosystème où billets et pièces deviendront l’exception.

Benjamin Murin

Benjamin Murin

Je m'appelle Benjamin Murin, 30 ans, je suis à la tête d'une entreprise dans l'industrie . Fort de 15 ans d'expérience dans l'industrie, je suis passionné par l'entreprenariat et la formation. Mon objectif est de simplifier et enrichir le parcours des entrepreneurs grâce à des ressources et des conseils pratiques.